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Rapport du Haut conseil de la famille sur l’inflation : qu’en retient l’Unaf ?

Le conseil de la famille du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) présente officiellement le jeudi 11 janvier 2024, son rapport sur "Le pouvoir d’achat des familles face au choc d’inflation", à l'élaboration duquel l'Unaf et les Udaf ont activement pris part. Ce rapport approfondi révèle la manière spécifique dont l'inflation a affecté les familles avec enfant(s), et ce sous plusieurs angles (notamment en utilisant les budgets types de l'Unaf), y compris celui des acteurs de terrain (dont de nombreuses Udaf). Il analyse l'impact sur les familles avec enfant des dispositifs mis en place par les Pouvoirs publics pour répondre à ce choc d'inflation, et leur plus ou moins bonne adaptation aux besoins des parents. Le Haut conseil formule enfin des recommandations, notamment celles de revaloriser plus vite des prestations familiales, et de tenir systématiquement compte des charges de famille dans la conception des aides anti-inflation. L’Unaf livre ici sa lecture du document.

Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge (HCFEA)

Le conseil de la famille du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) présente officiellement le jeudi 11 janvier 2024, son rapport sur « Le pouvoir d’achat des familles face au choc d’inflation », à l’élaboration duquel l’Unaf et les Udaf ont activement pris part.

Ce rapport approfondi révèle la manière spécifique dont l’inflation a affecté les familles avec enfant(s), et ce sous plusieurs angles (notamment en utilisant les budgets types de l’Unaf), y compris celui des acteurs de terrain (dont de nombreuses Udaf). Il analyse l’impact sur les familles avec enfant des dispositifs mis en place par les pouvoirs publics pour répondre à ce choc d’inflation, et leur plus ou moins bonne adaptation aux besoins des parents. Le Haut conseil formule enfin des recommandations, notamment celle de revaloriser plus vite des prestations familiales, et de tenir systématiquement compte des charges de famille dans la conception des aides anti-inflation. L’Unaf livre ici sa lecture du document.

L’inflation au sein des familles avec enfant(s) : un impact très visible dans les sources chiffrées

Face au peu d’analyses de l’impact de l’inflation selon la configuration familiale, le haut conseil a, pour combler ce manque, utilisé les résultats de six enquêtes et en en menant lui-même une septième.

En se fondant sur les dépenses constatées en 2017 par la dernière enquête « budget de familles », et en raisonnant toutes choses égales par ailleurs, le HCFEA conclut que plus les familles comportent d’enfant à charge, plus elles sont exposées à l’inflation. Cette pression inflationniste est conséquente : le coût mensuel du panier de biens et services des familles avec enfant augmente par exemple de 120€ pour une famille monoparentale entre avril 2022 et avril 2023, et celui des couples avec deux enfants et plus de 225 en moyenne.

Le Haut conseil calcule qu’en dépit de cette pression accrue du coût de la vie sur les familles avec enfant(s), le pouvoir d’achat des prestations familiales a baissé. Ceci équivaut, entre avril 2021 et avril 2023, à une perte cumulée de 200€ par unité de consommation pour les familles nombreuses, soit plus de 480€.

Face à une telle augmentation des coûts, les familles avec enfant ont davantage que les autres dû modifier leur consommation que les autres ménages. Observant les données issues d’une enquête spécifique menée par l’insee fin 2022, le rapport rappelle ainsi qu’ « En décembre 2022, les ménages avec enfant(s) déclarent plus souvent que les ménages sans enfant avoir changé leurs habitudes de consommation à cause de l’inflation : c’est le cas de 76 % des premiers contre 62 % des seconds. »

Ce changement s’est souvent fait par des privations :  à la lumière des données, plus fréquentes, sur les revenus et les conditions de vie (enquête SRCV), le HCFEA souligne que les familles nombreuses (trois enfants et plus) et les familles monoparentales, ont été particulièrement touchées par les privations matérielles.  Par ailleurs, l’étude des données de l’enquête « Conditions de vie et aspirations » du Crédoc, 70 % des personnes vivant dans un foyer avec enfants se déclarent en situation d’insuffisance alimentaire (soit neuf points de plus que l’ensemble de la population).

Le rapport va plus loin en consacrant un chapitre entier à l’étude de l’impact de l’inflation sur les familles avec enfant(s) à la lumière des budgets dits normatifs, c’est-à-dire les biens et services jugés nécessaires pour vivre décemment. Le Haut Conseil utilise pour ceci les budgets types de l’Unaf, et les budgets de référence de l’Onpes, et constate que « Tant les budgets-types de l’Unaf que les budgets de référence ont augmenté plus rapidement que l’inflation, de l’ordre d’un point de pourcentage de plus entre avril 2021 et avril 2023. ».

Le Haut conseil souligne une limite de son diagnostic  : il porte sur la seule consommation, et pas sur les ressources des parents, leur endettement ou leurs projets. Or face à l’inflation, les parents ont pu aussi chercher à augmenter leurs revenus professionnels, emprunter ou puiser dans leur épargne, ou encore « renoncer à un projet immobilier voire un projet d’enfant ». Le rapport précise que c’est « faute de données permettant d’en évaluer l’effet sur la situation des familles » que ces dimensions n’ont pu être étudiées. Le rapport précise par ailleurs que « face à l’inflation, les marges de manœuvre des parents ont pour limite leur obligation juridique de subvenir aux besoins de leurs enfants. Leur contrainte est donc potentiellement plus forte que celle de ménages sans personnes dépendantes ».

Inflation, précarité des familles avec enfant et arbitrages entre dépenses : la vision des acteurs de terrain de l’enquête « Classif »

Le HCFEA a mené une enquête originale auprès des grands réseaux d’acteurs associatifs et institutionnels, en les interrogeant tant sur leur perception de l’effet de l’inflation que sur leur manière d’y répondre. Dix réseaux ont contribué, le réseau des Udaf étant le plus prolixe envoyant à lui seul 130 réponses.

L’enquête permet d’établir « Un constat partagé d’accroissement des difficultés des familles en période d’inflation », les principales dépenses affectées étant l’alimentation, l’énergie et le logement. Surtout, rejoignant ici l’analyse des données statistiques, les acteurs font état de comportements d’arbitrages des familles « les familles sont conduites à couper dans certaines catégories de dépenses. Il ne s’agit pas forcément de celles pour lesquelles la hausse des prix est la plus marquée, mais plutôt de celles qui sont moins contraintes et sur lesquelles les familles possèdent une capacité d’arbitrage ». Les arbitrages sont différenciés : « le premier poste de privation pour les parents est le poste alimentation, alors que ce sont les loisirs pour les enfants. ». Et sans surprise, « Ces difficultés se traduisent par une nette augmentation des demandes d’aide adressées aux structures ».

L’insuffisante prise en compte des charges de famille par les mesures anti-inflation prises jusqu’à présent

Le HCFEA a analysé l’impact des mesures prises par les pouvoirs publics (« chèques », boucliers tarifaires…) pour limiter l’impact de l’inflation sur les ménages, et souligne qu’elles ont parfois été très couteuses tout en défavorisant les familles avec enfants. Une mesure dont la dépense a été particulièrement élevée, le chèque inflation (2,4 milliards d’euros) représentait un gain de niveau de vie inversement proportionnel au nombre d’enfants.

De même, les mesures tarifaires, les plus coûteuses, ne tiennent pas compte des charges de famille. De ce fait, « la baisse du niveau de vie due au renchérissement de l’énergie du logement et des carburants augmente avec le nombre d’enfants ».

Il recommande que toute mesure sociofiscale visant à soutenir le pouvoir d’achat des ménages soit conçue « de sorte que le gain par UC soit grosso modo le même pour toutes les configurations familiales », et conclut : « Compte tenu de l’expérience passée, la mesure la plus efficace consiste à augmenter le niveau des prestations familiales et de solidarité ».

Un impératif : mieux revaloriser les prestations familiales

Le HCFEA recommande donc, pour aider les familles face à l’inflation, d’utiliser comme véhicule le niveau des prestations familiales. Mais il souligne, comme l’avait noté l’Unaf à plusieurs reprises, mais aussi l’ancien HCF prédécesseur du HCFEA, que les règles actuelles « sont défavorables en cas de forte inflation », et plus généralement, sur le long terme, elles conduisent à l’érosion de leur pouvoir d’achat. Sur la période récente (2021-2024), elles ont perdu 4% de leur pouvoir d’achat.

D’où les propositions suivantes de rattrapage et d’amélioration des revalorisations des prestations familiales :

Mieux soutenir les associations, en particulier d’aide alimentaire

Le HCFEA propose que soient incluses des clauses d’indexation des subventions sur l’inflation dans les conventions pluriannuelles liant les associations à l’Etat, mais aussi un crédit d’impôt (et non simplement une réduction d’impôt) pour couvrir les frais des bénévoles.

Reprenant les résultats de l’enquête Classif, le HCFEA souligne que « si toutes les associations qui oeuvrent en matière de solidarité sont touchées, les associations d’aide alimentaire sont particulièrement fragilisées. » car elles étaient avant même la poussée inflationniste confrontées à une forte demande. Le Haut conseil recommande une pérennisation des aides mises en place depuis 2020, de garantir le volume des denrées subventionnées.

Enfin, le conseil souligne que « les crises récentes (pandémie de Covid-19, choc d’inflation) ont mis en évidence les limites des informations disponibles sur les ressources et les charges des associations. Il serait souhaitable d’améliorer ces informations. »

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